Le Son de la Terre est une chronique animée par Jérôme Sueur avec l'aide d'enregistrements des contributeurs de la sonothèque du Muséum national d'Histoire naturelle, d'audionaturalistes, et de scientifiques internationaux.
Chaque lundi à 14h50 dans la terre au carré sur France Inter.

 Ecoutez le chardonneret élégant Carduelis carduelis ici

 

Cousin du verdier, du canari et du pinson des arbres, le chardonneret élégant Carduelis carduelis offre un chant à l'image de son plumage : bariolé, rouge, jaune, châtain, noir et blanc, un ritournelle douce et flûtée aimée des hommes Jérôme Sueur en partenariat avec le Muséum national d'Histoire naturelle

Il est un  oiseau adulé depuis des générations dans les cultures omeyyades, andalouses, ottomanes et représenté plusieurs centaines de fois dans la peinture de la Renaissance italienne ou flamande. C'est le  chardonneret élégant Carduelis carduelis.

Cousin du verdier, du canari et du pinson des arbres, le chardonneret élégant Carduelis carduelis   offre un chant à l'image de son plumage : bariolé, rouge, jaune, châtain, noir et blanc, un ritournelle douce et flûtée aimée des hommes.

Cet oiseau nous accompagne depuis fort longtemps. Dans le nord de l'Europe, c'est son évanouissement qui alertait les mineurs de fond d'un possible coup de grisou.

En Afrique du Nord, comme nous le raconte si bien Seham Boutata dans son livre La mélancolie du maknine, maknine étant le nom algérien du chardonneret, cet oiseau est aimé, choyé, admiré, voire adoré.

Mais pourquoi cette passion pour le chardonneret et son chant ?

Le chant du chardonneret peut prendre des accents locaux, des régions d'Algérie ou du Maroc par exemple. Ces accents, ou dialectes, sont acquis lorsque les jeunes oiseaux apprennent leur chant en imitant les adultes, en quelque sorte des répétiteurs. Comme tout élève, les jeunes font par parfois des erreurs introduisant des nouveautés dans leurs vocalisations. Ces nouveautés sont transmises de génération en génération, non pas génétiquement, mais par apprentissage, selon une forme de transmission culturelle. Avec son accent marocain ou kabyle, le chardonneret emprisonné devient le porte-parole d'un territoire. En exil, l'oiseau rappelle avec nostalgie à son propriétaire la tiédeur des terres de son enfance.

Mais cette passion pour le chant du chardonneret ne causerait-il pas sa perte ?

Plumage, ramage et régionalisme poussent les hommes à faire de cet oiseau sauvage un amour en cage. On capture et on enferme donc le chardonneret qui devient l’objet d’un trafic international parfois plus rémunérateur que le cannabis. Entre 11 et 36 millions d'individus seraient tués ou capturés par an, 16 millions seraient maintenus en captivité.

Malheureusement la capture du chardonnet se fait non seulement par piégeage à la glu - vous savez cette délicate technique traditionnelle indolore dont on a parlé ces derniers jours - mais aussi par de larges filets dans lesquels tombent d'autres espèces d'oiseaux. Le chardonneret entraîne ses cousins dans sa chute.

Mais attention, que l'on ne s'y trompe pas, il ne s'agit absolument pas de chasse, mais bien de braconnage. Le chardonneret est strictement protégé : la capture d'individus sauvages est condamnée par les lois de tous les pays.

A ce trafic s'ajoutent la destruction des habitats et des pratiques agricoles qui utilisent trop de pesticides et qui laissent moins de plantes à graines dans les champs, qui sont la base de l'alimentation de ces oiseaux.

Toutes ces menaces affectent fortement le chardonneret dont les populations françaises ont baissé de 29 % entre 2001 et 2019, selon le programme de Suivi Temporel des Oiseaux Communs du Muséum, et dont l'aire de répartition se serait réduite de 57 %.

Limiter le déclin du chardonneret tout en comprenant les désirs humains passera certainement par l'aide au renforcement des populations sauvages et à l'élevage en captivité.  Mais il faudrait surtout favoriser l'observation en milieu naturel pour l'écoute d'un chant libre et fier, sans aucune frontière, sans aucun barreau.

Fermez les yeux, ouvrez les oreilles et les cages à l’élégance du chardonneret, ça ira vraiment mieux.

Le son de la Terre, une chronique du bioacousticien Jérôme Sueur en partenariat avec le Muséum national d'Histoire naturelle et sa sonothèque. Enregistrements de Fernand Deroussen.

Site web TAC:

http://www.mnhn.fr

https://sonotheque.mnhn.fr

https://naturophonia.jimdo.com/

Publié le : 07/09/2020 13:07 - Mis à jour le : 14/09/2020 14:05

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