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Peut-on détecter des évènements génomiques dans le registre fossile ? Retracer l’origine de la duplication du génome des téléostéens grâce aux cellules osseuses fossilisées

Donald Davesne*, Armin D. Schmitt, Matt Friedman, Per E. Ahlberg, Vincent Fernandez, Sophie Sanchez, Roger B. J. Benson

Les téléostéens représentent à eux seuls plus de la moitié des espèces actuelles de vertébrés, et sont connus pour posséder un génome dupliqué par rapport à celui des autres vertébrés. Cette duplication du génome pourrait avoir contribué à façonner leur diversité spécifique et anatomique, qui est considérable par rapport à celle des autres lignées actuelles d’actinoptérygiens. Si nous savons aujourd’hui que la duplication du génome est plésiomorphe pour les téléostéens actuels, le tempo et la position phylogénétique précise de cet évènement génomique sont encore inconnus, du fait de l’important intervalle de temps (environ 100 millions d’années) entre l’apparition des téléostéens modernes et celle de leur groupe-frère actuel.

Dans cette étude, nous proposons de contourner ce problème en faisant appel au registre fossile et à l’histologie osseuse. Les ostéocytes (cellules osseuses), à l’instar d’autres types cellulaires, sont plus ou moins volumineux selon la taille du génome d’un individu. Etant incorporés dans la matrice minéralisée de l’os, les ostéocytes laissent une cavité (ou lacune) visible dans les os fossiles. Nous avons fait appel à l’imagerie synchrotron pour reconstruire en 3D les lacunes ostéocytaires d’un large échantillon d’actinoptérygiens actuels et fossiles. La comparaison des volumes cellulaires des taxons actuels avec la taille de leur génome permet dans un premier temps de valider la corrélation entre les deux paramètres chez les actinoptérygiens. Les taxons fossiles étudiés proviennent principalement du Mésozoïque et constituent une série de groupe-frères aux téléostéens actuels (« stem-Teleostei »).

La reconstruction 3D des ostéocytes de ces taxons fossiles permet d’estimer la taille relative de leurs génomes. Les taxons les plus anciens et les plus éloignés phylogénétiquement des téléostéens modernes présentent des cellules de relativement petite taille, comparables à celles des non-téléostéens actuels. En revanche, certains des taxons de stem-Teleostei du Jurassique supérieur présentent des ostéocytes de très grande taille, suggérant la présence d’un génome dupliqué. Les représentants plus récents de ces lignées éteintes, ainsi que les plus anciens représentants fossiles des clades actuels, ont des ostéocytes de taille inférieure. Cela est compatible avec la probable réduction de taille du génome post-duplication qui est proposée pour les téléostéens actuels.

Nos données suggèrent que la duplication du génome des téléostéens a eu lieu au plus tard au début du Jurassique chez des taxons de stem-Teleostei dont la morphologie générale est proche de celle des taxons actuels. Cette duplication aurait été suivie par une réduction de la taille du génome qui semble s’être opérée parallèlement dans différentes lignées actuelles et éteintes. Pour la première fois chez les métazoaires, nous avons ainsi été à même d’observer une duplication génomique, directement dans le registre fossile.

Publié le : 05/08/2019 11:31 - Mis à jour le : 10/10/2019 14:31

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