Soutenance de thèse intitulée : "Evolution des queues chez les Papilionidae (Lepidoptera) : approche macro-évolutive et expérimentale"

Vendredi 16 décembre 2022

au Muséum national de d' Histoire naturelle

 

"Evolution des queues chez les Papilionidae (Lepidoptera) : approche macro-évolutive et expérimentale"

 

 

 

Le jury :

  • Patricia Beldade, Professor, Universidade de Lisboa, Rapportrice

  • Gilles Escarguel, Assistant professor, Université de Lyon 1, Rapporteur

  • Marianne Elias, DR CNRS, Muséum National d’Histoire Naturelle, Examinatrice

  • Claire Mérot, CR CNRS, Université de Rennes 1, Examinatrice

  • Rodolphe Rougerie, Assistant professor, Muséum National d’Histoire Naturelle, Invité

  • Vincent Debat, Assistant professor, Muséum National d’Histoire Naturelle, Directeur de thèse

  • Violaine Llaurens, DR CNRS, Muséum National d’Histoire Naturelle, Directrice de thèse

 

Abstract: 

The evolution of butterfly wing shape is driven by multiple selective, phylogenetic and developmental influences. In my thesis, I focused on the evolution of wing shape in Papilionidae, a butterfly family presenting a high diversity of wing shapes. Papilionidae are collectively referred to as Swallowtail butterflies, owing to the tails that many species harbour on the hindwings. While this feature is particularly striking and diversified, its evolutionary drivers have never been investigated. Did tails evolve neutrally? What are the selective pressures affecting it? Do forewings and hindwings evolve independently? By combining micro- and macro-evolutionary approaches, my thesis aimed at answering these questions and identifying the main factors affecting the evolution of wing shape, with a particular focus on hindwing tails. Focusing on Iphiclides podalirius, I first tested whether tails deflect birds attacks away from the butterfly body (the deflecting effect hypothesis; Chapter I). I showed that natural wing damages mostly concern hindwings tails and colour-pattern, suggestive of predation attempts; I then conducted a behavioural assay with dummy butterflies, and showed that great tits (Parus major) focus theirs attacks on the tails; finally, quantifying the mechanical properties of fresh wings, I found that the tails are particularly fragile. Altogether, these results support a deflecting effect of hindwing tails, suggesting that predation is an important selective driver of the evolution of tails in butterflies. I then investigated the relative aerodynamic importance of tails in flapping flight (the aerodynamic effect hypothesis; Chapter II), conducting flight analyses of phenotypically altered I. podalirius. I showed that hindwing tails have a significant stabilising impact on flapping flight, suggesting that selection on aerodynamic performance likely affects the evolution of tails. Based on these experimental results, I then quantified the variation of fore- and hindwing wing shape at the macro-evolutionary scale (across the Papilionidae family; Chapter III). I compared the shape diversity and evolutionary rate among the two wings, and tested the link between diversification and phenotypic disparity. I specifically characterized the evolution of the tail at the family level. My results show that hindwings are strikingly more diversified than forewings, suggesting contrasted selective regimes on the two pairs of wings. Forewings might be under stabilizing selection in relation to flight anteromotorism, while hindwings might be submitted to a diversity of selective pressures. Our results on I. podalirius suggest a possible trade-off between attack deflection and aerodynamic effects, promoting the diversity of hindwing shape, and particularly the evolutionary lability of tails and associated colour patterns. Contrary to previous work, my results also suggest a tight coevolution of the two wing pairs, the presence of tails possibly affecting the selection on the forewings. Overall, this study shows that the combination of behavioural ecology and macro-evolutionary studies might shed light on key factors affecting morphological evolution.

Altogether, my PhD work has brought some insights on the selection pressures involved in hindwing tail evolution and highlighted the complex links existing between forewings and hindwings evolution, between contrasted selection, developmental constraints and co-evolution.

 

Résumé : 

L'évolution de la forme des ailes des papillons est déterminée par de multiples influences sélectives, phylogénétiques et développementales. Durant ma thèse, je me suis concentrée sur l'évolution de la forme des ailes chez les Papilionidae, une famille de papillons présentant une grande diversité de formes d'ailes. Cette famille doit son nom aux queues que de nombreuses espèces arborent sur les ailes postérieures. Si cette caractéristique est particulièrement frappante et diversifiée, ses déterminants évolutifs n'ont jamais été étudiés. Les queues ont-elles évolué de manière neutre ? Quelles sont les pressions de sélection en jeu ? Les ailes antérieures et les ailes postérieures évoluent-elles indépendamment ? En combinant des approches micro- et macro-évolutives, ma thèse vise à répondre à ces questions et à identifier les principaux facteurs affectant l'évolution de la forme des ailes, avec un accent particulier mis sur l’évolution des queues des ailes postérieures. En prenant pour espèce modèle Iphiclides podalirius, j'ai d'abord testé si les queues déviaient les attaques des oiseaux du corp des papillons (hypothèse de l'effet de déflection ; Chapitre I). J'ai montré que les dommages naturels aux ailes concernaient principalement les queues et les motifs de couleur des ailes postérieures, suggérant des tentatives de prédation ; j'ai ensuite réalisé un test comportemental et montré que les mésanges charbonnières (Parus major) concentraient leurs attaques sur les queues ; enfin, en quantifiant les propriétés mécaniques des ailes, j'ai constaté que les queues étaient particulièrement fragiles. Dans l'ensemble, ces résultats confirment l'effet déflecteur des queues des ailes postérieures, suggérant que la prédation est un facteur sélectif important de l'évolution des queues chez les papillons. J'ai ensuite étudié l'importance aérodynamique relative des queues durant le vol battu (hypothèse de l'effet aérodynamique ; Chapitre II), en effectuant des analyses de vol sur des I. podalirius phénotypiquement modifiés. J'ai montré que les queues des ailes postérieures avaient un effet stabilisateur significatif sur le vol battu, suggérant que la sélection sur la performance aérodynamique affecte probablement l'évolution des queues. Sur la base de ces résultats expérimentaux, j'ai ensuite quantifié la variation de la forme des ailes antérieures et postérieures à l'échelle macro-évolutive (dans toute la famille des Papilionidae ; Chapitre III). J'ai comparé la diversité des formes et le taux d'évolution des deux paires d’ailes, et testé le lien entre diversification et disparité phénotypique. J'ai spécifiquement caractérisé l'évolution de la queue au niveau de la famille. Mes résultats montrent que les ailes postérieures sont étonnamment plus diversifiées que les ailes antérieures, ce qui suggère des régimes sélectifs contrastés sur les deux paires d'ailes. Les ailes antérieures pourraient être soumises à une sélection stabilisante, en lien avec l'antéromotricité du vol, tandis que les ailes postérieures pourraient être soumises à une diversité de pressions sélectives. Nos résultats sur I. podalirius suggèrent un compromis évolutif possible entre la déviation des attaques et les effets aérodynamiques, favorisant la diversité de la forme des ailes postérieures, et particulièrement la labilité évolutive des queues et des motifs de couleur associés. Contrairement aux travaux précédents, mes résultats suggèrent également une coévolution étroite des deux paires d'ailes, la présence des queues pouvant affecter la sélection sur les ailes antérieures. Dans l'ensemble, cette étude montre que la combinaison de l'écologie comportementale et des études macro-évolutives peut faire la lumière sur les facteurs clés de l'évolution morphologique.

Dans l'ensemble, mon travail de thèse a permis de mieux comprendre les pressions de sélection impliquées dans l'évolution de la queue des ailes postérieures et a mis en évidence les liens complexes existant entre l'évolution des ailes antérieures et des ailes postérieures, entre sélection contrastée, contraintes de développement et coévolution.

 
 
Publié le : 13/12/2022 17:55 - Mis à jour le : 06/03/2023 10:04

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